Pourquoi on minimise ce qu'on ressent (et pourquoi ça fait mal)
- laurianebernardin
- 27 nov.
- 3 min de lecture
On apprend très tôt à relativiser ce qu'on ressent. A dire "ce n'est pas si grave", à sourire quand ça pique, à tenir bon même quand ça tremble à l'intérieur. Mais minimiser ses émotions a un coût silencieux... et souvent bien plus lourd qu'on ne l'imagine.
Il y a cette petite phrase que beaucoup d'entre nous répètent : "Ce n'est rien".
Elle glisse presque naturellement, comme un réflexe. Un mur très fin derrière lequel on cache ce qui dérange, ce qui déborde, ce qu'on n'ose pas vraiment regarder.
On minimise ce qu'on ressent pour ne pas déranger, pour ne pas faire "des histoires", pour ne pas apparaître fragile.
On minimise parce qu'on a appris que certains sentiments étaient "trop", que certaines douleurs n'étaient "pas légitimes", que d'autres avaient "pire que nous".
Et s'en même s'en rendre compte, on finit par se convaincre qu'on devrait être plus fort, plus stable, plus raisonnable.
Mais on ne guérit jamais en faisant taire ce qui cherche à être entendu.
Pourquoi minimiser devient un réflexe
Minimiser ses émotions, c'est souvent une ancienne stratégie de survie. Pour beaucoup, c'était une manière d'éviter les conflits, de ne pas alourdir l'ambiance, de rester "le bon enfant", "celle qui gère", "celui qui ne se plaint jamais".
Alors on a appris à ravaler ce qui déborde. A normaliser ce qui fait mal. A sourire quand quelque chose se fissure à l'intérieur.
Avec le temps, ce réflexe s'automatise : on ne se demande même plus ce qu'on ressent vraiment.
On enfile directement le costume de la personne raisonnable, courageuse, discrète.
Mais sous le costume, il y a souvent un cœur qui se contracte, un corps qui retient, un mental qui force.
"Il y a pire que moi" : une phrase qui semble humble mais qui nous abîme
On croit souvent que relativiser, c'est faire preuve d'humilité. En réalité, c'est parfois une manière de se nier.
Comparer sa souffrance à celle des autres ne la rend pas moins réelle. Elle la rend simplement invisible.
Et ce qui est invisible, on ne le soigne pas.
Cette phrase - "il y a pire que moi" - empêche beaucoup de gens de demander de l'aide. Comme si souffrir nécessitait un quota, une justification, une hiérarchie.
Alors que la douleur, quelle que soit sa forme, mérite d'être reconnue.
Ce n'est pas égoïste de reconnaître que ça fait mal.
C'est courageux.
Le problème, ce n'est pas de tenir : c'est de s'oublier
A force de minimiser, on finit par s'oublier.
On confond endurance et résistance. On confond silence et force.
On confond maîtrise et déconnexion de soi.
Et puis un jour, le corps prend le relais : fatigue, irritabilité, tensions, chutes d'énergie, difficultés de concentration... Il dit ce que la bouche refuse de prononcer.
Parce que le corps ne minimise pas, lui.
Il ne ment pas.
Il ne négocie pas avec la vérité.
S'autoriser à dire : "Oui, ça me touche"
Reconnaître ce que l'on ressent n'a rien d'égoïste. Ce n'est pas se plaindre, ni dramatiser. C'est ouvrir une porte à ce qui demande de l'attention.
Parfois, mettre un mot sur une émotion suffit déjà à apaiser quelque chose.
C'est comme remettre un peu de lumière là où on avait éteint la pièce.
S'autoriser à dire :
"Oui, ça me blesse"
"Oui, ça me fatigue"
"Oui, ça me dépasse"
... ce n'est pas être faible.
C'est être humain.
Et souvent, c'est le début d'un vrai changement.
En conclusion : reconnaître, ce n'est pas exagérer, c'est respirer
Minimiser ce qu'on ressent ne fait pas disparaître la douleur.
Ca la rend juste silencieuse.
Et les douleurs silencieuses sont souvent celles qui durent le plus longtemps.
S'autoriser à dire "ça me touche" n'est pas un caprice. C'est une forme de respect envers soi-même. C'est un retour à la vérité intérieure. C'est une première étape vers quelque chose qui ressemble enfin à de la douceur.
Parce qu'il n'y a pas de "petite douleur".
Il n'y a que des émotions qui cherchent de la place pour exister.
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